lundi 1 novembre 2010

Pour la paix au Proche-Orient, l’eau est plus importante que le pétrole

On a souvent tendance à associer le Proche-Orient avec le pétrole. Mais aujourd’hui, dans les villes, villages et fermes de la région, c’est l’accès à une ressource différente qui devient un casse-tête : l’eau. Il est essentiel de s’attaquer à ce problème non seulement pour assurer les conditions d’un avenir viable, mais aussi pour donner une chance à la paix.
Il y a pénurie d’eau dans la région. Dans le même temps, les eaux usées urbaines et industrielles qui circulent à travers le bassin de l’Hébron et du Besor, qui coulent depuis la Cisjordanie, à travers le Néguev dans le sud d’Israël, jusqu’à la Méditerranée, ont endommagé l’environnement et posé de graves problèmes de santé aux résidents de la contrée, exacerbant du coup les tensions politiques, toujours présentes. Tout récemment, le débordement d’un égout dans une colonie israélienne en Cisjordanie a provoqué une contamination de l’environnement et des champs d’un village palestinien voisin.
Naguère, le Jourdain charriait, bon an mal an, 1,3 milliards de mètres cubes d’eau douce jusqu’à la Mer Morte. Aujourd’hui, ce volume est tombé à 20 ou 30 millions de mètres cubes en raison de la diversion de 98 pour cent de son débit par Israël, la Jordanie et la Syrie pour des usages agricoles et domestiques. La raréfaction de l’apport d’eau à la Mer Morte est la raison première de son assèchement, sans parler d’activités minières intensives.
Ces exemples de pollution de l’eau et de perte des ressources ne sont qu’un aspect de la crise de l’eau au Proche-Orient. Pour compliquer le problème, les responsables nationaux et régionaux continuent de fonctionner hors de toute planification ou gestion raisonnée des principales sources d’eau de la région : le Jourdain, la Mer Morte, et les aquifères côtiers et d’altitude. Sans parler du conflit arabo-israélien qui bloque souvent la mise en place de solutions viables de gestion partagée de la ressource.
La région doit certes résoudre ses problèmes d’environnement, mais elle doit avant tout régler les vieux conflits qui empêchent tout règlement de ses problèmes d’eau. EcoPaix/les Amis de la Terre Proche-Orient (FoEME), fondé en 1994 sous le nom EcoPaix, s’est transformée depuis en une organisation régionale unique composée d’environnementalistes israéliens, palestiniens et jordaniens. Elle a réussi à établir des actions coopératives transfrontalières visant à faire prendre conscience du problème et à inverser la dégradation d’un héritage environnemental partagé, tout en suscitant de bonnes relations et la confiance mutuelle.
Le projet Bons voisins de l’eau (GWN) lancé par les Amis de la Terre PO est un exemple d’activité qui engendre un esprit de coopération. GWN organise le jumelage de collectivités de part et d’autre de la frontière israélo-jordanienne, des partenariats entre collectivités israéliennes et collectivités palestiniennes ou jordaniennes partageant des ressources en eau communes afin de régler les problèmes de pénurie et de pollution. Cette interaction permet à des collectivités voisines de s’unir pour la réhabilitation du milieu, démontrant ainsi l’importance et la réussite d’une gestion écologique transfrontière.
Ainsi, entre 2007 et 2009 les collectivités partenaires de Tsur Hadassah en Israël et Wadi Fukin en Palestine, à force de pétitions, de campagnes et de menaces de procès contre le Ministère israélien de la Défense sont parvenues à empêcher la construction entre leurs villes de la barrière de séparation qui aurait irrémédiablement compromis leur accès commun à l’eau. Elles se sont lancées ensemble dans d’autres projets : la vente à Jérusalem des fruits et légumes produits à Wadi Fukin par le biais d’une coopérative gérée par un résident de Tsur Hadassah, ou encore des visites et échanges entre jardins d’enfants ou écoles primaires pour contrer les préjugés et la méfiance dès la plus tendre enfance. Leur dernière idée : la création d’un parc qui sera situé entre la ville israélienne et le village palestinien.
Tout dernièrement, FoEME a plaidé pour une coordination transfrontière entre Israël, la Palestine et la Jordanie pour garantir le développement durable du Jourdain et de la Mer Morte, alors que la Banque mondiale, de son côté, travaille sur les plans d’une conduite entre la Mer Rouge et la Mer Morte pour faire remonter le niveau de cette dernière. Mais ce projet a l’inconvénient de présenter des risques graves pour le milieu extrêmement sensible de la Mer Morte et modifier sa composition minérale unique. FoEME défend également la régénération du cours inférieur du Jourdain, qui débouche dans la Mer Morte.
Ces temps derniers encore, FoEME a encore organisé un événement dénommé “Un grand saut dans le Jourdain inférieur” pour attirer l’attention sur la situation écologique de ce cours d’eau. Des maires, des conseillers municipaux, des jeunes venus d’Israël, de Palestine et de Jordanie se sont jetés à l’eau pour affirmer leur objectif commun de ressusciter leur fleuve. Il est évident qu’une mauvaise gestion de l’eau continuera de mettre en danger les moyens de vie des populations et l’équilibre du milieu, jusqu’à ce que des mesures énergiques soient prises pour reconstituer des écosystèmes partagés grâce à une coopération au-delà des frontières.
D’ailleurs, les activités et les recherches de FoEME le prouvent, la coopération transfrontière peut ouvrir la voie à l’équilibre du milieu de vie et, qui sait, à la paix.

Source : France-Palestine

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