mercredi 17 mars 2010

La République du Congo à d’immenses ressources en eau mais pas les infrastructures…

Alors que la République Démocratique du Congo (RDC) s’apprête à organiser très prochainement les 2èmes journées portes ouvertes 2010 du secteur de l'eau et de l'assainissement, la ville de Mbuji-Mayi (anciennement Bakwanga) est sans eau depuis plus de 2 semaines
A l’occasion de l’annonce de ces journées consacrées à l’eau le ministre congolais du Plan Olivier Kamitatu soulignait que l'enjeu majeur pour la RDC, qui dispose d'immenses ressources en eau, consiste à en assurer la potabilité et la distribution auprès de la population.
Cela revient à mettre à court terme à la disposition des populations la quantité d'eau quotidienne correspondante aux normes et à un espace vital salubre, a-t-il dit.

M. Olivier Kamitatu a souligné que les 2èmes journées portes ouvertes du secteur de l'eau et de l'assainissement offriront à la RDC l'occasion d'attirer de nouveaux investissements.

Située au centre de l'Afrique et à cheval sur l'Equateur, la RDC est l'un des pays les plus arrosés du continent africain. Elle enregistre une pluviosité importante repartie sur toute l'année; soit 1.200 m3/s en moyenne et dispose des ressources en eau immense et diversifiées.
Cela implique, selon le ministre du Plan, le respect strict des normes environnementales pour éviter les impacts négatifs de la désertification. Avec un débit moyen de 42.00m3/s et des débits minimal et maximal pouvant atteindre respectivement 23.000 et 80. 000 m2, le fleuve Congo se classe premier en Afrique par la superficie de son bassin et 2ème dans le monde derrière l'Amazonie.
En dépit de toutes ces potentialités abondantes, 22% seulement de la population congolaise a accès à l'eau potable et 19% bénéficient des dispositifs adéquats d'assainissement, selon les statistiques publiées en 2006.

Défaillances en série des infrastructures d’eau potable de Mbuji-Mayi …
Mbuji-Mayi (anciennement Bakwanga) est la capitale de la province du Kasaï-Oriental, située sur la rive droite de la rivière Mbuji-mayi. La ville a, depuis les années 1980, multiplié sa population par 10, est compte aujourd’hui une population de presque 2 millions d’habitants. La ville est organisée en 5 communes : Bipemba, Dibindi, Diulu, Kanshi, Muya.
Trois communes sur les cinq que compte la ville de Mbuji-Mayi sont dépourvues d’eau potable depuis plusieurs semaines à la suite d’une panne survenue sur la pompe principale de la station de captage de la Regideso, la régie de distribution d’eau de la République du Congo. Du coup, les ménagères n’ont d’autre choix que de se tourner ver l’eau des rivières ou des pluies que leur offrent des revendeurs ambulants.
La pénurie d’eau frappe surtout les quartiers les plus populeux de Mbuji-Mayi.
Les habitants de ces quartiers sont alors obligés à débourser au quotidien 200 à 300 francs congolais pour obtenir 20 litres d’eau que proposent les revendeurs à vélo, sans aucune garantie des conditions hygiéniques.
Il y a quelques jours, un glissement de terrain au quartier Tshikama avait déboîté le grand tuyau de la Regideso, privant ainsi d’eau une grande partie de la ville.
Aussitôt réparée, cette panne a été suivie d’une autre sur le moteur de la principale pompe de la station de captage de Bakwa Kapanga.
Selon les responsables locaux de la Regideso, ces pannes remontent au 26 février.
Il ne reste pour le moment, précisent ces responsables, que deux petites pompes incapables de produire suffisamment de pression pour amener l’eau vers les abonnés des zones à haute pression. Les travaux de réparation sont en cours, mais l’échéance n’est pas connue.

Le cas de la RDC est un exemple marquant de la problématique de l’accès à l’eau puisque la ressource est disponible en grande quantité mais que les infrastructures de production et de distribution ne sont pas suffisantes pour permettre à la population d’avoir un accès correct à l’eau.
Et pendant ce temps à Kinshasa…
Kinshasa est une mégalopole de 8 millions d'habitants qui souffre d'un déficit généralisé d'eau potable. Le Programme Multisectoriel d'Urgence de Réhabilitation et de Reconstruction financé par la Banque mondiale a permis de réhabiliter les infrastructures de la Regideso, la compagnie qui dessert la ville en eau. La Regideso a pu ainsi doubler capacité de distribution de l'eau potable, résultats encourageants qui pourraient conduire à une extension du projet.
L'an 2009 aura été une année faste pour la Regideso (Régie de Distribution de l'Eau) qui vient de voir sa capacité de distribution de l'eau potable doublée à la suite des travaux exécutés sur son usine de N'Djili, à Kinshasa, dans le cadre du programme PMURR (Programme Multisectoriel d'Urgence de Réhabilitation et de Reconstruction), un projet de la République démocratique du Congo financé par la Banque mondiale. Les travaux ont duré quatre ans dans l'ensemble et coûté près de 51 millions d'euros.
Pour les 8 millions d'habitants de la ville de Kinshasa, c'est évidemment le grand soulagement. L'accessibilité à l'eau potable est l'une des préoccupations majeures dans cette mégapole qui n'arrête pas de recevoir de nouveaux habitants. Donc de nouveaux consommateurs d'eau potable. Le gouvernement congolais en a fait également l'une de ses priorités dans le programme des cinq chantiers de la République.
L'usine de N'Djili est la plus grande pourvoyeuse d'eau de la ville de Kinshasa. Elle fournit près de 65% de l'eau potable consommée dans la capitale de la République démocratique du Congo. C'est loin d'être suffisant. Il se pose un problème non seulement d'obsolescence des infrastructures de production mais aussi celui de la construction de nouvelles infrastructures.
Tshama Mavua, l'ingénieur chargé du contrôle et de la vérification des projets à la Regideso, explique : « La ville de Kinshasa connaissait un déficit généralisé d'eau potable ».
Le projet PMURR a permis à la Regideso, non seulement d'augmenter la capacité de production de l'eau potable passant d'une capacité de 220 000 m3/jour à 330 000 m3/jour mais aussi de rétablir la desserte en eau potable dans 22 communes de la zone d'influence de l'usine de N'Djili sur les 24 communes de la ville de Kinshasa. Ainsi vont notamment bénéficier des résultats des travaux sur l'usine de N'Djili, les communes de Gombe, Kinshasa, Lingwala, Limete, Kalamu, Kasa-Vubu, Bumbu, Ngiri-Ngiri, Selembao, Kintambo, Bandalungwa, Matete, Lemba, Ngaba, Makala et Mont-Ngafula ainsi que celles de Masina, N'Djili et Kimbanseke dont certains quartiers manquaient totalement d'eau potable.
Les travaux consistaient principalement en la réalisation d'un nouveau déversoir dans la rivière N'Djili en aval du barrage actuel, la réhabilitation des ouvrages existants, la réhabilitation d'un troisième module de dessablage, la pose de 19.300 m de grosse canalisation variant entre 250 et 1.000 mm, la construction et l'équipement d'un nouveau réservoir d'une capacité de 2300 m3. Le nouveau réservoir a été installé à Gombele, quartier Righini, en renforcement d'un autre plus ancien et de même capacité. Ce qui a permis de desservir des quartiers aussi éloignés que les communes de Ngaba ou Mont-Ngafula ou des quartiers comme l'Univeristé de Kinshasa ou Kindele, dans le Sud de la ville. La plupart de ces quartiers du Sud n'existaient pas pendant la période coloniale et n'étaient donc pas prévus dans la desserte de la ville.
Cette réserve stratégique d'eau de Gombele a comme avantage supplémentaire de préserver les consommateurs de cette zone d'une rupture intempestive d'eau en cas de défaillance d'électricité ou d'une avarie sur le système. La station de pompage peut continuer la fourniture de l'eau en attendant le rétablissement de la situation normale.
A la Regideso, c'est avec fierté que l'on exhibe les résultats des travaux d'alimentation en eau potable dans la ville de Kinshasa, travaux financés par la Banque mondiale. Les ouvrages sont gigantesques et modernisés. Ils peuvent se résumer en deux points majeurs : la récupération de la capacité de production de l'eau potable et l'amélioration de la qualité de l'eau. L'usine de N'Djili peut désormais donner le maximum de sa capacité avec une eau de qualité. Avec ses deux anciennes usines réhabilitées d'une capacité nominale de 110.000 m3 /jour chacune, elle a récupéré son rendement initial de 220.000 m3 alors que celui-ci était descendu jusqu'à 140.000 m3/jour.
Les populations bénéficiaires du projet PMURR-Regideso ont déjà constaté une amélioration certaine dans la desserte de l'eau à domicile. La pression est devenue plus forte au robinet et l'eau est permanente alors qu'auparavant, il fallait se réveiller en pleine nuit, aux petites heures du matin, pour espérer s'approvisionner en eau. Encore que ce n'était pas évident tous les jours. Mme Annie Mujinga habite le quartier Makelele, dans la commune de Bandalungwa. Elle s'en souvient : « L'amélioration de la desserte de l'eau potable est indiscutable dans notre quartier. Je me rappelle qu'il n'y a pas longtemps, il fallait chaque nuit dormir d'une oreille, l'autre restant à l'écoute de l'extérieur, car vers les trois heures du matin, dès qu'il y avait de l'eau au robinet, les voisins ameutaient tout le quartier en annonçant l'arrivée de l'eau à grands cris. Nous devions alors nous réveiller pour remplir le plus de récipients possible de la maison ne sachant pas quand l'eau serait de nouveau de retour au robinet ».
En effet, l'eau ne restait pas longtemps au robinet. Après deux ou, tout au plus, trois heures, le robinet redevenait sec, et pour longtemps. Mme Christine Bonzene de la commune de Kintambo, voisine à celle de Bandalungwa, s'était déjà résolue à creuser un puits dont elle puisait l'essentiel de ses eaux domestiques, son robinet étant resté sans eau depuis de longs mois. Un jour des agents de la Regideso sont venus lui installer de nouveaux tuyaux et un nouveau robinet dans la parcelle.
L'usine de N'Djili, la plus importante des quatre qui desservent la capitale congolaise avec une capacité de production de 330.000 m3/jour, devance celles de Ngaliema qui produit en moyenne 85.000 m3/jour, de Lukunga avec 45 000 m3/jour et celle de la Lukaya, la toute nouvelle usine avec 24.000 m3/jour. Il demeure qu'avec une production totale de 484.000 m3/jour, le déficit en eau pour la ville de Kinshasa reste important en regard des besoins estimés à 750.000 m'/jour. Ce déficit ne pourra être comblé que par un apport plus important en eau potable. Et donc par un appui financier plus important des partenaires au développement.
Le présent projet PMURR qui vient de se terminer à la satisfaction de tout le monde, aussi bien des bénéficiaires que de l'entreprise Regideso, appelle bien d'autres travaux additionnels, conséquence justement de l'amélioration technique de l'infrastructure. La réhabilitation de l'usine de N'Djili appelle forcément d'autres travaux dont notamment la réhabilitation de tout le réseau vieux d'une cinquantaine d'années. Les nombreuses fuites observées dans la canalisation à différents endroits de la ville constituent, à ce sujet, une sonnette d'alarme suffisante pour la Regideso.
En amont, les conditions de captage de l'eau restent encore tributaires de l'incivisme des populations riveraines de la rivière N'Djili qui polluent abondamment les eaux avant qu'elles n'atteignent le barrage de captage. Les impuretés déversées dans la rivière N'Djili, en amont du barrage de captage empêchent celui-ci de recevoir le maximum de l'eau nécessaire à envoyer à l'usine pour traitement. Aujourd'hui, deux pirogues submergées et charriées par les eaux entravent l'entrée normale de l'eau brute dans le barrage de captage de la Regideso. L'idéal serait de construire un ouvrage de filtrage de l'eau brute en amont du pont sur la rivière N'Djili afin de débarrasser l'eau brute d'impuretés qui pourraient gêner le bon fonctionnement des machines.
Cependant, la clôture annoncée du PMURR est de nature à susciter quelques inquiétudes, surtout côté gouvernement congolais, quant à la pérennisation des acquis. Il s'agit de la maintenance des infrastructures existantes et du financement de nouveaux projets de développement. Une chance se profile tout de même à l'horizon, car le chef projet se dit satisfait de la manière dont le PMURR a été mené ainsi que des résultats obtenus.

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