jeudi 20 mai 2010

Comme un poison dans l'eau...

Après s'être notoirement enrichis pendant des décennies, les vendeurs d’eau en bouteille voient depuis quelques années leur avenir sous un jour nettement plus sombre. Même si les pays émergents représentent un potentiel de croissance encore considérable, dans les économies occidentales, une prise de conscience a lieu, et des initiatives se multiplient pour dénoncer l'aberration économique et le scandale écologique que constitue l'eau en bouteille. Quelques exemples parmi tant d'autres, aux Etats-Unis, la Conférence des maires a voté une résolution appelant les municipalités à abandonner l'eau en bouteille et à promouvoir l'importance des réserves publiques d'eau potable, à Londres, la ville impose l’eau du robinet dans la restauration avec sa campagne «London on Tap », en Australie, les habitants de la ville de Bundanoon, un lieu touristique célèbre pour ses beaux paysages et se trouvant à 150 kilomètres au sud-ouest de Sydney, a voté avec une écrasante majorité l’interdiction pure et simple des bouteilles d'eau en plastique. La Ville de Paris, tout dernièrement, a amorcé une campagne de communication sur le même thème . Ces actions ne sont pas forcément très coordonnées, mais elles traduisent une évolution des mentalités dont l'impact sur les ventes d'eau en bouteille est indéniable. La crise aidant, les consommateurs joignent l'économique à l'éclogique, et désertent massivement les rayons d'eau en bouteille.

Bilan des courses en France, le marché, qui s'est retourné en 2007, plonge sans voir le fond. Les ventes en 2008 avaient fini à -7%, et 2009 a encore été fortement négatif ! Evian, qui représente presque 10% du chiffre d'affaires de Danone, ne produit plus qu'1,5 milliards de litres, pour une capacité de 2 milliards. Et encore est-elle la marque qui s'en sort le mieux : Taillefine, autre marque du groupe Danone, a été retirée du marché suite à une nouvelle réglementation européenne interdisant les ajouts de minéraux (en l'occurence du calcium et du magnésium), et Nestlé Waters, de son côté, sous-performe même vis-à-vis de ses prévisions les plus pessimistes. Bref, les marketeux de la flotte sont à cran.

Deux leviers s'imposaient pour redonner de l'attractivité à court terme aux grandes marques : la promotion et la communication. Sur le premier, elles ont fortement appuyé : la part de vente sous promotion a doublé en trois ans. Sur la communication, l'affaire est autrement épineuse : car l'heure ne semble plus à l'innovation (les eaux aromatisées, qui ont tiré la croissance du marché au début des années 2000, sont à -30%), et les fallacieuses promesses de jeunesse, santé, minceur, etc., qui ont fait les beaux jours du secteur, ont été battues en brèche par la communauté scientifique, et ne font plus recette. Restent donc les publicités choc de la marque cristalline, associant l'eau du robinet aux eaux usées des toilettes. Reste surtout à revenir aux fondamentaux, à la raison d'être de ce marché : la peur diffuse du robinet.

L'année dernière, ce fut au bon docteur Servan-Schreiber, qui justifiait précédemment son existence médiatique en s’attaquant à la dangerosité des téléphones mobiles, de sortir de son chapeau une « étude » consistant en fait en une compilation de données déjà parfaitement établies, pour préconiser « aux personnes malades du cancer ou qui sont passées par la maladie de ne boire quotidiennement de l’eau du robinet que si elles sont sûres de sa qualité »… (source : http://infos-eau.blogspot.com/2009/07/jj-servan-schreiber-et-la-tempete-dans.html) Devant l’indignation des experts, du ministère et des écologistes (qui eurent beau jeu de rappeler que deux études scientifiques de mars 2006 et de novembre 2008 soulèvent également la question de la migration du plastique de la bouteille vers l’eau de substances nocives comme l’antimoine), Servan-Schreiber a affirmé ne pas avoir voulu critiquer l’eau du robinet, et s’en est tenu à cette position d’évidence : la qualité de l’eau est globalement bonne en France, mais dépend aussi des régions et des dispositifs mis en place pour la traiter ; il est aussi très probable que boire une eau de mauvaise qualité est dangereux. En somme, rien de nouveau sous le soleil. Mais alors pourquoi lancer cette polémique ? Comme disent les Dupond et Dupont dans « Tintin au pays de l’or bleu », pardon de l’or noir, cherche à qui le crime profite.

Cette année, le nouveau dada anxiogène s'appelle le radon. Une journaliste, bien entendu indépendante, en fit son cheval de bataille, et vient de produire un documentaire « choc » sur le sujet, diffusé le 17 mai en prime-time sur France 3. Avec « Du poison dans l'eau du robinet », on ne va pas y aller par quatre chemins : apprenez-le, vilains qui rechignez à payez le juste tribut dû aux minéraliers, distributeurs et autres philanthropes, vous empoisonnez vos enfants ! Musique angoissante, caméras cachées et racourcis fallacieux vous en persuaderont, si les arguments développés ne parviennent à vous convaincre. Le complot existe, et des très très méchants tirent les ficelles, gare !

Qu'importe que l'eau du robinet soit en France le produit alimentaire le plus surveillé. Qu'importe que sa qualité soit presque partout équivalente, voire supérieure, à celle d'un bon nombre d'eaux en bouteille. Qu'importe aussi que dans le monde, chaque année, 1,5 à 2 millions de personnes meurent faute de bénéficier d'une eau de la même qualité que celle qui coule dans nos cuisines... Le jour où il faudra nous faire acheter de l'air en bouteille, il se trouvera certainement un journaliste (indépendant) pour démontrer combien il est toxique de respirer à l'air libre. Business oblige.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

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