mercredi 8 juillet 2009

Le Cemagref en pointe pour réduire la consommation hydrique agricole


A Montpellier, des chercheurs consacrent leurs travaux à la réduction de la consommation d'eau dans l'agriculture, qui absorbe dans le monde 70% de l'eau douce consommée annuellement, avec l'objectif de "valoriser chaque goutte" de cette ressource vitale.

Les travaux de ces chercheurs du Cemagref (institut de recherche pour l'ingénierie d'agriculture et de l'environnement) suivent deux axes principaux: expérimenter un nouveau mode d'irrigation basé sur "un goutte à goutte enterré" et promouvoir, notamment au Maghreb, une reconversion de l'irrigation classique, par rigole, vers le goutte à goutte de surface.

Le récent Forum mondial de l'eau, à Istanbul, a mis en évidence que le temps de l'eau facile était révolu sur cette planète soumise à la double pression de la croissance démographique - la population devrait passer de 6,5 milliards d'humains aujourd'hui à 9 milliards en 2050 - et du réchauffement climatique.

Réduire la consommation d'eau dans l'agriculture tout en augmentant la production alimentaire, "c'est le grand challenge", analyse Sami Bouarfa, chercheur au Cemagref.

Dans l'arboriculture et le maraîchage, le "goutte à goutte de surface", avec des tuyaux à même le sol, a déjà fait ses preuves. En limitant l'évaporation, cette technique "permet de réaliser une économie de 50% d'eau par rapport à l'irrigation par rigoles, et de 15% par rapport à l'irrigation par aspersion (jets), couramment pratiquée en France", souligne Sami Bouarfa.

Mais elle est incompatible avec le passage d'engins de labours ou de récolte sur les terres semées de céréales, qui représentent en France environ 50% des cultures sur les terres arables.

Il est donc indispensable d'enterrer les tuyaux, ce qu'expérimente depuis deux ans le Cemagref à Montpellier, où des parcelles de blé, d'orge et de maïs sont cultivées avec les trois techniques d'irrigation: aspersion, goutte à goutte de surface et enterré. Objectif: analyser et comparer la croissance de la plante, les quantités d'eau utilisées, les rendements de la céréale, et enfin modéliser sur ordinateur les données recueillies.

Avec le goutte à goutte enterré, 10% d'eau pourraient encore être économisés par rapport au goutte à goutte de surface, assure Pierre Ruelle, agronome au Cemagref.

"Ce n'est pas négligeable mais cela risque de ne pas suffire", souligne Sami Bouarfa.

Car dans le monde, l'irrigation gravitaire - par rigoles - est de loin la technique la plus utilisée. Mais elle est souvent à l'origine d'un grand gaspillage.

Participer à la conversion des agriculteurs au goutte à goutte est donc une autre mission que mènent, notamment au Maroc, avec les autorités et les chercheurs marocains, les équipes du Cemagref et du CIRAD.

Dans ce pays, un million d'hectares sont irrigués en gravitaire et l'enjeu est d'en convertir plus de la moitié au goutte à goutte classique, d'ici 2020.

Un défi dans la mesure où les agriculteurs sont habitués à submerger leurs cultures, note Sami Bouarfa. Par ailleurs, pour les petits exploitants, le passage au goutte à goutte représente un risque économique, même si le Maroc accorde jusqu'à 60% de subventions pour l'équipement.

Mais ce sont eux qu'il faut convaincre, car ce sont les plus nombreux et ils occupent les plus grandes surfaces. C'est là un vrai enjeu, dit Sami Bouarfa.

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