samedi 27 septembre 2008

La récupération des eaux de pluie : attention à bien respecter les enjeux sanitaires !


L’arrêté ministériel du 21 Aout 2008, apporte des précisions sur l’usage interne de la récupération des eaux de pluies. Cet arrêté « relatif à la récupération des eaux de pluie et à leur usage à l'intérieur et à l'extérieur des bâtiments », attendu depuis plusieurs mois, vient d'être publié au JO du 29 août 2008. Il fixe un cadre assez strict pour les installations et limite les usages autorisés.

Si la récupération des eaux de pluie est une mesure utile parmi d’autres dans le cadre d’une stratégie d’optimisation de la ressource, il convient de mettre en place les dispositifs de façon prudente, compte tenu de risques potentiels pour la santé publique.


L’arrêté est l’un des textes d’application de la loi sur l’eau du 30 décembre 2006. Un autre texte va suivre : l’arrêté relatif au crédit d’impôt. Le texte définit « les conditions d’usage de l’eau de pluie récupérée en aval de toitures inaccessibles, dans les bâtiments et leurs dépendances, ainsi que les conditions d’utilisation, d’entretien et de surveillance des équipements nécessaires à leur récupération et utilisation. » Par toitures inaccessibles, il faut entendre les couvertures ne recevant aucun public.

Des règles relatives à l’utilisation des eaux de pluie

Le texte autorise la collecte des eaux de pluie, mais en limite l’usage. L’eau de pluie collectée à l’aval de toitures inaccessibles peut être utilisée pour des usages domestiques extérieurs au bâtiment : arrosage, fontaines, etc. L’arrosage des espaces verts accessibles au public ne pourra l’être qu’en dehors des périodes de fréquentation du public.

En ce qui concerne les usages domestiques intérieurs, les limites sont importantes : d’une part les toitures ne doivent pas être en amiante-ciment ou en plomb ; d’autre part, l’eau collectée ne peut être utilisée que pour les sanitaires et le lavage des sols. Pas question de la boire ou de s’en servir pour se laver !

Autre autorisation : ceux qui souhaiteraient laver leur linge avec de l’eau de pluie doivent le déclarer auprès du ministère en charge de la santé, et doivent mettre en œuvre des dispositifs de traitement de l’eau adaptés, à titre expérimental.

Certains établissements n’ont pas le droit de mettre en place ce genre de dispositif : les établissements de santé et établissements, sociaux et médicaux (sociaux, hébergement de personnes âgées), les cabinets médicaux, cabinets dentaires, laboratoires d’analyses de biologie médicale et des établissements de transfusion sanguine ou les crèches, écoles maternelles et élémentaires.

Enfin, les usages professionnels et industriels de l’eau de pluie sont autorisés à l’exception de ceux qui requièrent l’emploi d’eau destinée à la consommation humaine telle que définie au Code de la santé publique.

Des règles relatives à la mise en place des dispositifs de récupération

L’arrêté précise un certain nombre d’obligations relatives aux dispositifs à mettre en place pour récupérer et conserver l’eau, ainsi que pour la mettre à disposition des individus. Les prescriptions générales, quelle que soit l'utilisation, sont détaillées dans l'article 2 : stockage à la pression atmosphérique, matériaux inertes à l'eau de pluie, grille antimoustique de mailles de 1 millimètre au maximum, disconnexion avec le réseau public d'eau potable par surverse totale avec garde d'air, trop plein calibré avec clapet anti-retour si raccordement avec les égouts, affichage « eau non potable ».

Tout d’abord, il est interdit de raccorder le réseau d’eau de pluie avec le réseau de distribution d’eau destinée à la consommation humain. Les points de soutirage d’eau de pluie doivent présenter une plaque de signalisation qui comporte la mention "eau non potable" et un pictogramme explicite. Bien évidemment, des dispositifs de filtration doivent être mis en place pour l’usage domestique à l’intérieur. Il faut aussi installer des mécanismes pour éviter les élévations de température (développement des bactéries) et afficher clairement sur les canalisations que l’eau n’est pas potable (pour éviter les branchements erronés sur le réseau public).

Pour éviter que les gens confondent différents types d’eau, il est interdit de mettre à disposition dans la même pièce (sauf les caves, les sous-sols ou les pièces annexes à l’habitation).

Pour éviter les problèmes en cas de fortes précipitations, un système de trop plein doit permettre d’évacuer l’eau en surplus. On doit vérifier tous les 6 mois la propreté, la signalisation et la déconnexion du réseau d’eau de pluie. De plus, il faut nettoyer les filtres et les cuves de stockages tous les ans.

Un carnet sanitaire doit être tenu à jour, avec le plan des installations, une fiche de mise en service, le listing des opérations d'entretien réalisées et le relevé mensuel du « système d'évaluation des volumes d'eau de pluie utilisés à l'intérieur des bâtiments raccordés au réseau de collecte des eaux usées ».

L'arrêté rappelle également l'obligation de déclaration d'usage en mairie prévue par l'article R.2224-19-4 du CGCT avec l'identification du bâtiment et l'évaluation des volumes utilisés à l'intérieur des bâtiments.

Alors, pourquoi toutes ces contraintes ?

Si l'on peut se féliciter de ce qu'un cadre légal permette désormais d'encadrer des pratiques de recyclage qui avaient déjà cours, il faut maintenant s'assurer que sa mise en œuvre préservera les consommateurs de toute confusion et de tout risque sanitaire.

La récupération de l’eau de pluie est évidemment sympathique. Elle semble participer de ces petits gestes que nous souhaitons tous faire, afin d’améliorer la situation de l’environnement. Elle comporte aussi d’autres avantages : l’eau n’est pas calcaire et l’on peut se constituer des réserves en cas de sécheresse.

Cependant, contrairement aux idées reçues et aux imaginaires bien ancrés, l’eau de pluie n’est ni pure ni potable, même si elle est en théorie très proche de l’eau douce.

En effet, l’eau de pluie, avant de tomber dans nos toits et rues, subit la contamination des gaz, particules, aérosols provenant de l’activité humaine. Elle contient donc outre de la poussière, des ions inorganiques en provenance de la mer (Calcium, Magnésium, Sodium, Potassium, Chlore, SO4, cuivre, zinc, plomb). On y retrouve évidemment toutes les particules et pollutions urbaines issues des industries et des gaz d’échappement des voitures (Dioxyde de carbone, NOx, SOx).

On y trouve aussi des pesticides, parfois en grandes concentrations. Le Dr René Seux, Professeur à l'école nationale de santé publique, explique comment ils peuvent se retrouver dans l’atmosphère : « « Les départs » ont lieu lors de l'application (dérive) puis dans les jours qui suivent l'épandage (transfert sol/air). Les pesticides se trouvent alors sous forme gazeuse ou particulaire, susceptibles d'être entraînés dans l'eau de pluie. » Le docteur cite des résultats pour 1996 et 2000 sur la Bretagne : « les concentrations pour l'atrazine et l'alachlore, qui sont les deux principaux pesticides du maïs, peuvent atteindre 10, 20, voire plus de 200 fois les normes tolérées pour l'eau potable ! »

Il faut aussi savoir que la pollution par pesticides se déplace : « A Paris, les concentrations sont égales à celles constatées à 100 km de la capitale ». Et puis qu’elle dure.

Il faut aussi penser aux pluies acides.

Mais il y a un autre risque, dû aux souillures du toit, par des mousses, des déjections animales, mais aussi au stockage dans des citernes.

Au final, selon un avis du Conseil supérieur d’hygiène publique de France, rendu public en septembre 2006, l’eau de pluie doit être utilisée avec précaution.

Il peut être dangereux de la boire, comme chacun sait. Le problème, c’est que l’expérience d’autres pays montre que des bricoleurs finissent toujours par installer une arrivée d’eau polluée sur le réseau. D’autre part, si l’arrêté paraît aussi pointilleux, c’est que des insuffisances d’entretien posent parfois des problèmes de mélange entre les réseaux, l’eau pluviale non traitée contaminant l’eau traitée.

Il va donc être nécessaire, outre les recommandations techniques concernant les dispositifs eux-mêmes, de développer la formation et la qualification des professionnels et d’encadrer le contrôle et le suivi de ces installations, en instaurant des systèmes de déclaration et de surveillance par des organismes tiers. En outre un certain nombre de bâtiments n’obtiendront pas l’autorisation d’utiliser de l’eau non potable, qu’il s’agisse des industries agro-alimentaires, des établissements de santé ou des crèches.


3 commentaires:

  1. Que l'eau de pluie ne soit ni pure ni potable n'est pas le problème ici. Dans ce cadre de loi on cherche encore une fois a préserver les intérêt des maitres de l'eau en France (Veolia, Suez, Saur). Un traitement UV et un portage a ébullition suffit a rendre l'eau de pluie douteuse aussi consommable que n'importe quelle eau qui vient du réseau, chargée en chlore dont les effets a long terme sur l'organisme sont discutables. De plus en milieu rural les nappes phréatiques ne sont pas épargnées par les pesticides et autre cochonneries agricoles...
    Qui a déjà pris la peine de faire analyser sont eau soit disant potable ?

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  2. Pour votre information, incultes que vous êtes :
    L'acidité des pluies se neutralise fort aisément, il suffit soit d'utiliser une cuve de recup EDP en beton (le beton va neutraliser le ph de l'eau) soit vous mettez un ou deux parpaing de cette meme matiere dans votre cuve PER...
    Maintenant je constate qu'on prefere laisser les agriculteur continuer de polluer comme des gros boeufs et emmerder les usagers finaux, plutot que de dire a ces abrutis "n'utilisez plus autant de pesticides"...

    Ce qui m'amuse avec cette loi c'est qu'a écouter le gouvernement, l'eau de pluie est vraiment pas bonne... Doit on se barricader chez soi les jours de forte averse ?

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  3. Pour rendre l'eau de pluie potable un simple système d'osmose inverse suffit. Certe le débit n'est pas énorme, mais c'est juste pour la boire.
    On trouve ce genre de système dans les magasins d'aquqariophilie.
    Il faut tout de même prévoir un résistivemètre ( lui aussi en vente au même endroit) afin de contrôler dans le temps le bon fonctionnement de la membrane.
    Pour toutes les autres utilisations ( WC, douches,toilettes,machine à laver, ..), une filtration jusqu'à 5 à 10µm suffit largement.
    On peut éventuellement adjoindre un filtre à charbon actif s'il y a des odeurs.

    Par ailleurs, la position du gouvernement est très hypocrite, car si l'on met en place une cuve, il faut la déclarer en mairie, avec pour l'instant aucune conséquence. Mais lorsue l'on sait que la facture d'eau est basée sur l'eau entrante et non sortante, on rejette plus d'eaux usées que le compteur n'en voit passer. Le simple fait dobliger à déclarer plutôt que d'interdire montre bien qu'il n'y a aucun problème moyennant une installation correcte et que l'on en revient bien au manque à gagner des monopoles sur l'eau à moyen terme.

    En ce qui me concerne, j'ai une cuve béton ( parpaing creux + enduit hydrofuge de 16000L net) qui tourne depuis 10ans sans aucun soucis, captage flottant à 20cm sous la surface et stockage dans surpresseur.Récuparation de la totalité du toit soit 120m².
    Elle n'a été vidée qu'une seule fois en septembre 2003 à cause de la canicule.
    Depuis j'ai un système de remplissage automatique ( flotteur de pompe pilotant une vanne) afin de recompleter le niveau partiellement avec le réseau si défection de pluie , le complément se faisant par surverse de plus de 50cm afin de ne pas énerver la compagnie des eaux !

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