dimanche 31 mai 2009

Encore de la pédagogie à faire !

Une commune du Nord de la France hésite à passer de l’eau en bouteille à l’eau du robinet. Pourtant, ce serait moins cher, et plus écologique à cause des bouteilles en plastique. Le motif de cette hésitation ? Certains élus ont entendu dire qu’il y avait des nitrates dans l’eau du robinet.

Mise au point des autorités sanitaires : le taux autorisé est de 50mg/litre, et il a été calculé par rapport à la quantité tolérable par les consommateurs les plus faibles, c’est-à-dire les nourrissons et les femmes enceintes. L’eau du robinet validée par la DASS est donc potable et peut même être utilisée pour les biberons des nouveaux nés, n’en déplaise au marketing d’Evian et consorts…

En tout cas, les idées reçues ont la vie dure…

lundi 18 mai 2009

Du rôle de l’OCDE sur la question de l’eau

Dans un article paru il y a quelques mois sur le site de l’observateur OCDE, Asit K. Biswas, Président de l’Institut du tiers-monde de gestion de l'eau au Mexique, et Cecilia Tortajada, Directeur scientifique du Centre international de l’eau à Saragosse en Espagne, estiment que l’eau représente un enjeu de plus en plus important dans tous les pays, et qu’une approche originale et cohérente est aujourd’hui nécessaire. Cet article qui pour parti fait écho au post datant du 17 mai sur les infrastrucutres en eau aux Etats-Unis souligne le rôle prépondérant que peut et doit jouer l’OCDE sur la question de l’eau. Nous reproduisons ci-dessous le coeur de cet article :

« Selon le président John F. Kennedy, celui qui saurait résoudre le problème de l’eau mériterait deux prix Nobel : un pour la paix et l’autre pour la science. Plus de quarante ans après sa mort, le monde prend la mesure de la complexité et de l’urgence des problèmes liés à l’eau auxquels l’humanité est confrontée, et de la pertinence de sa remarque.

On a parfois l’impression que les problèmes d’eau concernent surtout le monde en développement et qu’ils ont été résolus depuis longtemps dans les pays de l’OCDE. C’est totalement faux, et ce pour plusieurs raisons, dont nous allons étudier certaines.


Premièrement, même si la contamination de l’eau due à des sources ponctuelles, comme les tuyaux d’égout, n’existe plus dans la plupart des pays de l’OCDE, la pollution diffuse continue de représenter un problème majeur. Par exemple, le golfe du Mexique comporte désormais une zone morte qui pourrait par moments atteindre 22 000 km2. L’infiltration d’engrais agricoles, ensuite transportés jusque dans le golfe par des cours d’eau comme le Mississippi, est à l’origine de cette zone hypoxique (déficitaire en oxygène).

Les sources ponctuelles de pollution de l’eau restent un problème important dans quelques pays de l’OCDE, notamment en milieu rural et dans les petites zones urbaines. À mesure que de nouveaux membres rejoignent l’OCDE, celle-ci doit dans son ensemble s’interroger sur les aspects sanitaires et environnementaux de la gestion de la qualité de l’eau.


Deuxièmement, les infrastructures hydrauliques de tous les pays de l’OCDE vieillissent rapidement et leur remise en état est lourde et coûteuse. Par exemple, l’Agence de protection de l’environnement aux États-Unis estime que le pays devra dépenser 23 milliards USD de plus par an pendant les vingt prochaines années pour avoir des infrastructures d’alimentation en eau et d’assainissement qui fonctionnent et sont conformes aux réglementations nécessaires. La situation est comparable dans tous les pays de l’OCDE. Compte tenu de l’ampleur des financements à trouver, il faut non seulement renforcer le débat public, mais aussi développer la recherche pour trouver de meilleures solutions économiques, techniques et de gestion.


Troisièmement, les réflexions sur les problèmes liés à l’eau dans les instances internationales s’intéressent principalement à l’alimentation en eau potable dans le monde en développement. Considérée sous cet angle très étroit, quoiqu’essentiel, l’eau ne pose pas un problème grave pour les pays de l’OCDE. Cependant, l’eau potable représente moins de 10 % de la consommation mondiale. Le reste est utilisé à des fins alimentaires, énergétiques et environnementales, ainsi que dans le cadre du développement régional. Tous ces secteurs sont importants dans les pays de l’OCDE.

L’eau concerne plusieurs secteurs, et l’efficacité de son utilisation et de sa gestion dépendra de plus en plus des actions menées dans d’autres domaines. Par exemple, l’eau et l’électricité sont étroitement liées. L’eau est indispensable pour produire de l’électricité en grande quantité, qu’il s’agisse de faire tourner les turbines de centrales hydroélectriques ou de refroidir les installations de centrales thermiques ou nucléaires. Dans un pays membre comme la France, le secteur de l’énergie utilise beaucoup d’eau. Inversement, le secteur de l’eau consomme énormément d’électricité. Au Mexique, par exemple, il absorbe près du quart de la production. Pourtant, presque aucun pays, y compris dans l’OCDE, n’applique de politique énergétique prenant explicitement l’eau en considération, et inversement.

De même, la production de biocarburants a des incidences notables sur la qualité et la quantité d’eau. Il est communément admis que son accroissement, aux États-Unis, augmentera la superficie de la zone morte du golfe du Mexique, sous l’effet de l’intensification du ruissellement de produits agrochimiques imputable à cette production. Dans un monde en évolution rapide, les dimensions et la portée des problèmes liés à l’eau changent elles aussi. Les pays de l’OCDE devront redoubler d’attention pour faire face à ces nouveaux problèmes.


Quatrièmement, une gestion de l’eau efficace pour le futur doit pendre en compte le changement climatique. Le climat a toujours connu des fluctuations, mais dès lors que le changement climatique vient s’ajouter aux variations habituelles, les problèmes deviennent plus complexes.

Il n’est pas très utile, pour la gestion de l’eau, de dire que les températures mondiales augmenteront de quelques degrés ou qu’il y aura davantage d’événements climatiques extrêmes. En l’état actuel de nos connaissances, il est impossible de prédire avec fiabilité l’évolution annuelle moyenne prévue des précipitations et des températures dans un pays donné, et encore moins dans un bassin hydrographique. De plus, des informations supplémentaires sur les variations probables des précipitations seront essentielles pour la gestion future de l’eau, de l’agriculture, de l’énergie et de l’environnement.


L’OCDE doit jouer un rôle actif pour porter ces questions essentielles à l’attention des dirigeants nationaux et internationaux et des scientifiques, afin d’élargir nos connaissances et de trouver des solutions adaptées et efficaces par rapport à leur coût.

L’OCDE devrait se positionner aux avant-postes et militer en faveur d’actions spécifiques et tournées vers l’avenir, notamment dans les domaines importants où d’autres institutions internationales ne parviennent pas à montrer la voie et n’y parviendront probablement pas dans le futur. Certes, l’OCDE jouit déjà d’une bonne réputation pour ses travaux sur les politiques de l’eau. Il est cependant très encourageant de constater que le Secrétaire général Angel Gurría considère précisément l’eau, la santé et les migrations comme des domaines d’activité prioritaires. Remarquons au passage que ces trois thématiques sont interconnectées.

Les responsables de l’action publique doivent faire davantage pour coordonner les politiques de l’eau, de l’énergie, de l’alimentation et de l’environnement, notamment du point de vue de leurs relations symbiotiques (comment ces différentes ressources interagissent et influent les unes sur les autres). Ces interactions ne sont pas encore prises en compte dans les politiques de manière globale. Cette absence de remise en question des approches actuelles risque de se traduire par une action de plus en plus inefficiente et inefficace, notamment en termes sociaux, économiques et environnementaux.


Selon l’OCDE, « l’évolution rapide du paysage mondial implique que les processus et pratiques de gestion de l’eau seront confrontées à des difficultés intersectorielles et de plus en plus complexes, quasiment inédites, imputables à l’exploitation d’autres ressources et à d’autres domaines d’activité. Y faire face avec succès et à temps exige un changement d’état d’esprit, des approches innovantes et des solutions nouvelles. Nous sommes convaincus que l’OCDE est l’une des très rares institutions, voire la seule, qui dispose des connaissances, de l’expertise et du savoir-faire scientifique et technologique nécessaires pour cerner de manière fiable les futurs problèmes liés à l’eau, et proposer des solutions applicables. Il incombe à l’OCDE de s’attaquer aux problèmes complexes liés à l’eau auxquels le monde sera confronté dans les années à venir. Elle n’a tout simplement pas le choix si elle veut remplir sa mission et répondre aux attentes mondiales. »


L’OCDE étant l’une des institutions internationales les plus impliquées dans le secteur de l’eau, nous aurons l’occasion d’en reparler dans une série d’articles sur ce blog.



dimanche 17 mai 2009

Les Etats-Unis doivent investir massivement dans leurs infrastructures d’eau

Des niveaux élevés de plomb (Pb), élément chimique particulièrement dangereux pour le développement mental des enfants, ont été mesurés récemment dans l'eau du robinet à Washington.

Erik Olson, directeur des programmes sur l'eau potable du Natural Resources Defense Council/NRDC, groupe de défense de l'environnement précise que ''la crise de Washington est un reflet de la situation dans l'ensemble du pays''. Il précise qu'il existe des problèmes dans d'autres grandes métropoles, en raison, au-delà du plomb, du réseau de distribution constitué de conduites en fer anciennes et dans lesquelles se développent des bactéries.

Appuyant les propos d’E. Olson, des estimations officieuses du Centre fédéral de contrôle des maladies infectieuses d'Atlanta indiquent que l'eau consommée serait responsable d'au moins 900.000 cas d'intoxication d'origine bactérienne plus ou moins graves. Ainsi, le pire cas en 30 ans d'intoxication collective par l'eau s'était produit en 1993 à Milwaukee où 400.000 personnes sont tombées malades, dont une centaine sont décédées.


Erik Olson met également en cause les systèmes trop anciens de filtrage avec du sable qui ne permettent pas d'éliminer les pesticides et autres polluants industriels actuels. Il dénonce ainsi des technologies de traitement de l'eau datant de la Première Guerre mondiale encore utilisées dans 90% des grandes villes américaines alors qu'en Europe la purification est assurés par des systèmes utilisant des ultraviolets (UV) et des membranes capables de retenir les bactéries.


Benjamin Grumbles, responsable de la division eau potable de l'Environnemental Protection Agency (EPA) prévoit que la modernisation des infrastructures, destinée à assurer la qualité de l'eau tout en faisant face à l'augmentation de la démographie (325 millions prévus en 2020 contre 290 aujourd'hui), nécessite d'urgence des investissements importants sous peine de se retrouver face à un gouffre financier d'au moins 222 milliards de dollars au cours des vingt prochaines années.


Alors que la solution simple de financement pourrait résider dans l'augmentation du prix de l'eau qui reste très faible aux Etats-Unis comparativement à l'Europe, Jim Elder, un ancien responsable de l'EPA, rappelle que les Américains sont très réticents à payer davantage pour leur eau dont ils font une consommation par trop abondante (environ deux fois plus que dans les autres pays industrialisés, la consommation d'eau moyenne par an d'un foyer américain étant de 400 m3 alors qu'elle est de 150m3 en France) . Craignant le mécontentement de leurs administrés, il précise que les maires des municipalités craignent d'augmenter la facture pour financier une meilleure purification sous peine d'être sanctionnés aux élections.

Selon l’Agence de protection de l’environnement (EPA), le réseau national d’eau présenterait 240.000 fissures qui occasionnent le gaspillage de l’eau potable et causent un danger pour les citoyens. Le plan d’investissement national de 2 milliards de dollars de l’administration Obama pour améliorer les infrastructures hydriques est jugé « insuffisant. »


Pr. Lebdi Fethi : « il y a une «école tunisienne» en matière de gestion de l’eau.. »

Voici une interview très intéressante de Lebdi Fethi, directeur de l’institut national agronomique de Tunis (INAT) et spécialiste de l’eau en Tunisie. Selon le Professeur Fethi, la Tunisie est dans une situation relativement confortable, car elle a mis en place dans les dernières années un vaste programme d’aménagement de la ressource, notamment par barrage. Elle est aujourd’hui en train de développer un programme de technologies en matière d’eau, en s’appuyant notamment sur une gouvernance mixte, publique et privée. L’un des axes intéressants est la conception de l’effort humain pour l’accès à l’eau que défend le professeur : « le coût (de l’eau) est absolument relatif. Les Espagnols ont choisi le dessalement à coût élevé mais c’est rentable. L’Espagne n’est pas un pays pétrolier et il faut aussi oser, quelquefois. Dans l’univers de l’eau, il n’y a ni tabous ni limites. C’est le génie de la nature et celui de l’homme qui s’adaptent à la nature. Il faut garder espoir et croire en l’avenir. ». Le point de vue du Professeur Fethi, bien qu’en totale contradiction avec les prévisions alarmistes émises par les instances internationales, démontre cependant que la persistance et l’assimilation des technologies nouvelles en matière de gestion de l’eau pourraient à l’épreuve du temps faire mentir les conclusions les plus négatives.

Propos recueillis par Amel DJAIT :


J’ai récemment lu que la Tunisie n’aurait pas soif jusqu’en 2030. Faut-il s’en réjouir ou en pleurer ? 2030, n’est-ce pas déjà demain ? Où en est réellement la situation de l’eau en Tunisie ?

Lebdi Fethi: S’il y a véritablement une personne qui se hasarde à prévoir que la Tunisie aura soif d’ici une date précise, alors permettez-moi de déclarer qu’elle n’a rien compris à l’eau et à son histoire en Tunisie. Avant de spéculer sur l’avenir, il faut lire et comprendre l’histoire. L’Histoire dans le domaine de l’eau a prouvé que notre pays n’a jamais eu soif. A moins d’un changement climatique «miraculeux» et tant que nous avons les eaux de surface ou de pluie -eaux qui se régénèrent-, nous n’aurons pas soif. Nous serons confrontés probablement à des situations de pénurie plus sévères au vu des changements climatiques et d’un déséquilibre entre l’offre et la demande, qui augmente considérablent au gré de l’évolution économique du pays et du bien-être du citoyen.

Sachez qu’ avec un système de l’eau qui s’appuie sur les eaux de surface, le stockage, la mobilisation et le transfert qui fonctionne en termes de complémentarité entre les systèmes hydrauliques et les régions, nous n’aurons pas soif en Tunisie.

Avec les avancées technologiques dans le domaine du dessalement, la Tunisie regorge de suffisamment d’eau saumâtre, que nous avons les moyens d’exploiter, grâce aux technologies appropriées, pour affronter des situations difficiles. Nous avons les compétences humaines pour exploiter ces eaux. Cela coûterait cher, mais face à des situations critiques ou extrêmes, tout devient relatif.

Vous savez, pour nous qui travaillons en amont, 2025 c’est déjà aujourd’hui. Les ressources de l’eau disponibles au stockage aujourd’hui sont estimées à plus 2 milliards de m3 de capacité. A l’avenir, les ressources de surface peuvent atteindre les 300 millions d’eaux usées traitées. Cela permet de bénéficier des ressources additionnelles.


La Tunisie a tout de même été déclarée vivant dans un état de «stress hydrique» par la Banque mondiale


Absolument, selon la norme de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). La Banque mondiale estime que lorsqu’on vit en dessous de 500 m3/an/habitant, alors on vit en état de «stress hydrique». Ce stress hydrique a alors un impact direct sur le niveau de vie, de l’hygiène et le fonctionnement social et économique d’un pays.

Je vous retourne la question : Est-ce qu’en Tunisie, où l’on vit avec moins de 500 m3 par an et par habitant, nous sommes confrontés à de problèmes sérieux d’hygiène par exemple ? L’état de santé en Tunisie est-il à ce point préoccupant ?


Il me semble que vous contestez complètement cette appréciation...


Bien sûr ! Pour comprendre, il faut se référer aux données et méthodes à l’origine de ces prévisions et constations. Un stress hydrique est soit physique (moins de 500 mètres cubes par an/ha) et vérifiable par rapport à l’impact social et économique du manque de l’eau. Dans notre cas, cette thèse ne se vérifie pas. Le Tunisien moyen possède sa douche et n’a jamais eu de rationnement d’eau potable. Nous n’avons jamais effectué de coupure ou de rationnement d’eau. L’irrigation se fait normalement et le pays possède des eaux en stockage interannuel.

Il n’existe pas un véritable stress hydrique sauf physique selon la norme OMS, mais nous gérons pour l’irrigation les événements secs, qui sont structurels pour la Tunisie et non conjoncturels, grâce à une régularisation interannuelle des réserves d’eau.


L’eau est au cœur de la machine économique. Certains secteurs ne mettent-ils pas en danger nos ressources en eau ?


L’eau est considéré en Tunisie comme un facteur de production assez important, notamment dans les produits d’exportation et d’importation. A titre indicatif, le prix de l’eau est compris dans le prix de vente de la tomate. L’argent obtenu, à travers l’usage de l’eau, permet à une entreprise d’importer ce qu’elle ne peut produire aujourd’hui en Tunisie. Et cela crée un effet compensatoire.

Nous avons réalisé une étude, il y a quelques années sur cette question. L’enseignement principal qui se dégage de cette étude est que nous sommes en mesure d’importer deux fois ce que l’on exporte en termes de quantités d’eau. Par exemple, quand vous importez une banane, vous importez aussi de l’eau. C’est même mieux, en termes de valeur cela peut atteindre jusqu’à 7 fois la valeur de l’eau.

Donc, le Tunisien ne vit pas avec à peine 500 m3, il vit avec le double. C'est cela la vérité du terrain. Cela imbrique l’existence d’une machine complexe qui repose sur un système de services derrière l’agriculture et l’eau. Grâce à cette machine, on considère qu’il y a une augmentation des ressources hydriques. Cette eau existe de manière virtuelle à travers les produits des activités économiques et commerciales.


Mais au-delà du rôle valeur, l’eau est un droit fondamental, un élément de stabilité et de paix.


L’eau est tentaculaire. C’est une ressource qui touche à plusieurs domaines. C’est certes une question technique mais il faut en comprendre toutes les autres facettes : sociales, juridiques et législatives, financières, économiques, politiques, etc. La réussite et l’efficacité de la gestion dépendent de la prise en considération de toutes ces facettes. Quand nous parviendrons à en mesurer et répondre à toutes ces facettes, nous arriverons au stade de la bonne gouvernance et à initier -ce n’est pas encore le cas- une véritable gestion intégrée des ressources en eau.


Sommes-nous justement arrivés à ce fameux stade de bonne gouvernance en matière d’eau ?


On va vers la bonne gouvernance, mais actuellement, il faut mettre sur la table les questions d’efficience de l’usage de l’eau, de durabilité des ressources et d’équité d’allocation, pour réussir ce challenge.


Pourriez-vous résumer les différentes étapes que nous avons réalisées et quels sont les objectifs à venir ?


Durant les années 1990, la Tunisie a engagé un programme colossal dans le domaine de l’eau, d’où actuellement découle une certaine confortable position. Cependant, il convient de faire attention. La première décennie a été caractérisée par la mobilisation et l’évaluation des ressources hydriques qui s’est traduite par une politique de construction de barrages que nous continuons, par ailleurs. Je fréquente les instances internationales et analyse les autres politiques de l’eau dans le monde. Mon objectif est de contribuer à savoir s’il y a éventuellement d’autres projets à engager et des technologies nouvelles ou des modèles en cours de promotion.

Nous avons choisi une stratégie qui nous est propre et elle fonctionne mais elle est à renforcer. Je n’exagère rien en vous demandant d’aller voir chez les autres, ne serait-ce que sur le même continent, pour saisir l’intérêt de la démarche tunisienne. Nous n’avons pas transféré de l’eau sur des centaines de kilomètres sans objectif d’efficience. Nous l’avons trouvé et procuré là où elle ne se trouvait pas. Le cas du sud de la Tunisie est édifiant à plus d’un titre.

Grace à cette politique, nous avons pu fixer les habitants et convertir cela en richesses et développement. La Tunisie a réussi à garantir ses frontières et son espace vital. Vous rendez-vous compte seulement du travail colossal qui a été fait par une génération d’hydrauliciens tunisiens pionniers? Nous avons puisé certaines expériences dans l’Histoire pour la conservation des eaux et du sol et la gestion participative et continuons à tirer profit des technologies pour l’économie de l’eau et la réutilisation des eaux usées traitées. Pour la nouvelle décennie, l’objectif consiste à engager d’importants investissements et augmenter les ressources par d’autres moyens, notamment par des ressources non conventionnelles (eaux usées traitées, dessalement d’eau saumâtre et d’eau de mer).

L’Espagne a adopté une stratégie qui consiste à faire du dessalement de l’eau de mer au profit de l’agriculture sous serres. A Alicante, il y a des centaines d’hectares irriguées par ce type d’eau. L’eau y coûte près de 1$ mais la production agricole y est impressionnante et arrive à justifier ce coût de l’eau.


Le coût de l’eau est donc relatif selon vous ?


C’est ce que je dis souvent : le coût est absolument relatif. Les Espagnols ont choisi le dessalement à coût élevé mais c’est rentable. L’Espagne n’est pas un pays pétrolier et il faut aussi oser, quelquefois. Dans l’univers de l’eau, il n’y a ni tabous ni limites. C’est le génie de la nature et celui de l’homme qui s’adaptent à la nature. Il faut garder espoir et croire en l’avenir. Il suffit de mettre les outils et les moyens pour l’assurer. Par nature, je suis optimiste. Nous sommes en plein cœur du sujet, l’eau c’est la vie.


Vous êtes conforté par la nature ou par le savoir-faire des hommes ?


Par les deux. Vous savez, l’homme oublie vite, très vite. Il y a 30 ans, vous auriez demandé à un agriculteur ou un consommateur s’il pouvait trouver des tomates au marché en plein mois de décembre, il vous aurait rit au nez. Il faut aller par étape, se mettre des objectifs et y travailler.

Nous avons fait de la disponibilité globale, mais avons encore des problèmes en termes de disponibilité locale. Il ne faut pas se le cacher. Nous avons accompli en grande partie les grands aménagements et la mobilisation, les grands transferts, les grands ouvrages, mais nous avons encore des questions à résoudre au niveau local et des corrections d’orientation dans la politique de l’eau, eu égard à l’actualité climatique et du marché et aux prévisions des changements climatiques.

Les questions de durabilité commencent aussi à apparaître dans les systèmes de l’eau, surexploités.


En ayant un coût, l’eau a forcément un prix. Les agriculteurs grognent par rapport à un prix qu’ils estiment élevé. Qu’en pensez-vous ?


Si aujourd’hui certains disent 150, 160 ou 180 millimes, c’est cher, permettez-moi de demander : est-ce cher par rapport à la manière de valoriser l’eau ? Cela peut choquer, mais réellement le barrage a coûté 100 millions de dinars et plus. Un barrage a une durée de vie, il faut l’entretenir et faire en sorte qu’il ne soit pas envasé de sitôt… Dans notre pays, certains barrages ont 50 ans comme celui de «Mellegue». Les barrages ont une durée limitée dans le temps, à cause de l’envasement et de la sédimentation. Désormais, nous avons un important défi à affronter. Qu’est-ce qui peut remplacer un système de mobilisation d’eau à partir des barrages dans un siècle ou dans 50 ans ? Les sites de barrages ne sont pas infinis.

Pour revenir à votre question, l’eau coûte cher pour sa mobilisation, sa disponibilité et son accessibilité, très cher même. Réalisez-vous qu’elle nous coûte près de 500 et jusqu'à 800 millimes parfois ? Aujourd’hui, si je vous la vends à plus du coût actuel, êtes-vous capables de produire et de gagner de l’argent ? D’autres le font. Pourquoi pas nous ? Ceci est le véritable challenge de la gestion de l’eau pour l’avenir, dans un souci de valorisation économique, ayant à l’esprit bien entendu un équilibre social à sauvegarder.

C’est une question de compromis entre objectifs, parfois conflictuels, de l’usage de l’eau. Les secteurs usagers de l’eau vont pouvoir se mettre à table pour départager la ressource en cas de pénurie, même conjoncturelle. Les instances d’arbitrage doivent évoluer avec ce concept, où le risque de non satisfaction de la demande est très probable. Le code des eaux lui-même va devoir être repris, en intégrant les objectifs de satisfaction de la quantité mais aussi de la qualité. Le service de l’eau fourni à l’usager regroupe les deux paramètres de qualité et de quantité.

L’agriculture prend environ 80% des ressources hydriques du pays. Des questions aussi capitales que l’autosuffisance alimentaire se posent. Les céréales constituent une part belle de l’équation. Aujourd’hui, nous concevons des céréales autour des périmètres irrigués. Nous cherchons l’eau et installons autour d'un système de production. Désormais, au lieu de faire des céréales autour de la source d’eau, il faut «créer» l’eau pour les zones céréalières, rapprocher l’eau des zones de production et non l’inverse.


Concrètement, cela reviendrait à faire de Kairouan ou de Siliana une zone céréalière ?


Kairouan, Siliana, Jendouba, Le Kef, Béja, Bizerte, etc. Il faut réfléchir à des autoroutes de l’eau qui absorbent le surplus d’eau en cas de crues et desservent des zones potentielles en cas de crise. Les céréales sont un domaine important qu’on ne peut négocier. C’est une question de souveraineté. Il y a un grand polymorphisme en Tunisie. Vous êtes à 1.000 mm par an en moyenne à Sejnane et descendez à 600, 400 ou 200 mm à quelques centaines de kilomètres. Vous passez d’une forêt à Aïn Draham et en quelques heures, vous vous retrouvez dans le désert. Cela se traduit par une dégradation hydrologique rapide.

La Tunisie est très riche en termes d’approche de l’eau. C’est vraiment une école de l’eau. Cette diversité hydrologique se traduit sur les cultures et les comportements des individus. La société oasienne ne se comporte pas comme celles des grandes cultures.

Aujourd’hui la tâche est de travailler en termes de complémentarités. Nous devons penser aux transferts. Ils doivent être travaillés dans le sens de l’équité, de l’efficience et de la durabilité.


Pour revenir à la question des barrages, existe-il d’ores et déjà des éléments de réponse ?


Sur décision présidentielle, le versement des eaux usées dans la mer a été interdit. Ceci oblige à traiter les eaux usées selon des normes très rigoureuses. Valoriser ces eaux par leurs réutilisations, en particulier pour les terrains de golf et pour l’agriculture, est à l’ordre du jour. Nous aurons environ 200 mille mètres cubes d’eaux traitées par jour et il faut réfléchir à établir une adéquation entre la production des eaux usées traitées et nos besoins de réutilisation. S’il n’y a pas cette adéquation, nous serons obligés de stocker quelque part. Les barrages sont des espaces de cols naturellement propices et si la technologie peut nous aider à faire des grands stocks sur des plaines, là où les problématiques des barrages se poseront en d’autres termes.

Aujourd’hui, le nombre de sites propices à mettre en place un barrage dans notre pays est limité. Cette optimisation se posera à nous rapidement. Je rappelle qu’il y a déjà une deuxième génération de barrages souterrains en place qui sont des barrages imperméables créés à partir de digues souterraines. L’avenir est à la création d’une troisième génération de barrages.

S’agissant des eaux usées traitées, il faut tenir compte des mégaprojets dans le Grand-Tunis comme le projet de «Sama Dubaï», «Bled El Ward», le port de plaisance, le pôle financier, etc. Nous allons avoir de grandes quantités d’eaux usées, à cela s’ajoutera une contrainte de non pollution. C’est là que les barrages de troisième génération répondront à cette question, pour stocker les millions de m3 d’eaux usées traitées, en attente d’exploitation ultérieure (réservoirs de surface, barrages souterrains ou nappes rechargées).


Elle est où la différence entre les barrages?


La différence entre barrages courants et ceux pour les eaux usées est simple. Le barrage recueille par ruissellement l’eau de pluie qui est tout à fait aléatoire. Dans le cas des eaux usées, il s’agit de 300 millions de mètres cubes d’eaux traitées par an qui sont certaines (il n’y a pas d’aléa comme la pluviométrie), qui seront réutilisées ou stockées selon l’inadéquation entre la demande et le besoin. C’est un travail énorme à faire. Certaines études sont en cours pour étudier le transfert de ces eaux vers les zones de production céréalières ou fourragères.


Dans la pratique, les agriculteurs tunisiens peuvent-ils résister à des périodes de sécheresse extrêmes ?


L’agriculture paysanne a du bon en ce sens qu’elle permet d’agir avec une culture de gestion de petite exploitation qui lui est propre. Elle est de fait capable de résister à un événement extrême d’une manière beaucoup plus efficace qu’un Européen, car elle maîtrise les petites astuces du système de la paysannerie. Ces petites agricultures font un système cohérent dans lequel il faut introduire des technologies tout en s’appuyant sur des systèmes de collecte d’eau.

C’est un système à petite échelle qui fonctionne sans beaucoup de contraintes technologiques.


Au vu des grandes caractéristiques de l’expérience tunisienne, peut-on exporter le " know how" tunisien ? Existe-t-il une «école tunisienne» de l’eau?


Absolument, il y a une «école tunisienne» en matière de gestion de l’eau, et il convient de l’appuyer. Une génération est déjà partie à la retraite et il faut assurer la continuité sans perdre les acquis de cette école. Tout le challenge consiste à animer et centraliser les débats pour en tirer les meilleures conclusions à mettre au service des décideurs.

La tendance mondiale est à la privatisation de l’eau. Par exemple, pour l’eau potable, il existe des maillons nécessitant l’efficacité et la souplesse du privé. Ces maillons peuvent répondre à bien des exigences. La SONEDE, l’ONAS et les privés dans le domaine de l’eau ont assez d’expertise pour aller chercher des marchés en Afrique subsaharienne par exemple ou ailleurs.


Vous pensez que dans cette phase de privatisation, les opérateurs privés et publics peuvent se mettre en avant à un niveau international ?


Le Code de l’eau a été changé et il sera travaillé dans les prochains jours pour qu’il soit adapté au secteur public-privé. Ne perdons pas de vue que l’eau est un bien public. Sa gestion doit être administrée par la communauté et le secteur public, car ce dernier regarde l’intérêt public collectif, qui n’est pas obligatoirement la somme des intérêts individuels. Il est important qu’au niveau des allocations, le débat et l’arbitrage se réalisent entre les différents secteurs. Le compromis entre ces secteurs doit être arbitré par les pouvoirs publics.

La Tunisie a une spécificité qui lui est propre. L’eau y est gérée par le ministère de l’Agriculture et des Ressources hydrauliques. Aujourd’hui, la ressource et sa production vont ensemble. Il faut développer le niveau de négociation pour qu’il y ait un compromis. Nous pouvons gagner des parts de marché à l’étranger. C’est même nécessaire. Il faut de la souplesse, de l’efficacité et de la responsabilité.

Le système de l’eau a besoin de financements. Et les ramener à travers le secteur public uniquement n’est plus d’actualité. L’Etat a d’autres engagements et tellement d’urgences. Des sociétés opérant dans l’énergie solaire pour le pompage dans les petites exploitations, des entreprises comme l’ONAS ou la SONEDE, sont capables de ramener de l’argent pour financer le secteur de l’eau en Tunisie. Des villes entières dans des d’autres pays sont totalement prises en charge par les sociétés genre SONEDE qui viennent de l’étranger. Ces sociétés n’ont pas de meilleure expertise que nous. Il suffit de maîtriser les technologies et mettre un cadre de gestion adéquat, responsable, souple et motivant, pour qu’on puisse être au niveau que ces sociétés étrangères.


L’Union pour la Méditerranée (UPM) place l’eau au cœur de ses problématiques. Concrètement, quel serait le projet idéal pour construire la Méditerrané des eaux ?


Pour sortir de l’ordinaire des discours, je vous dirais que si Hannibal a traversé les Alpes avec des éléphants, on peut imaginer le transfert de l’eau de l’Albanie où il y a un problème de drainage via la Sicile. Si on fait des tuyaux de fibres optiques pour les télécommunications et des conduites pour le gaz à travers la Méditerranée, on peut faire cela pour l’eau. Ce n’est pas une fiction, à la différence primordiale que l’eau est une valeur humaine qui n’est pas négociable selon les mêmes termes mercantiles.


La question méditerranéenne est aussi une question d’eau. A supposer que la Tunisie ait demain assez d’eau pour recharger ses nappes souterraines et transférer l’eau vers les grands espaces de production, vous pensez qu’un citoyen tunisien sentira le besoin de partir?


Personnellement, je ne le pense pas. Il restera chez lui, exploitera sa terre et y vivra en paix. La différence entre le Sud et le Nord, c’est aussi l’eau. Le Nord a la maîtrise technologique. L’UPM peut poser la question de développer un système égalitaire de l’eau. Est-ce qu'elle va le faire ? En tout cas, c’est un débat politique passionnant pour le bien-être entre rives nord et sud.

Pour aller plus loin :

Rapport du bureau régional Moyen Orient et Afrique du Nord, « Evaluation du cout de la dégradation de l’eau », juin 2007.

samedi 16 mai 2009

Managing and transforming water conflicts


Jérôme Delli Priscoli et Aaron T. Wolf, publient l’ouvrage intitulé « Managing and transforming water conflicts » dans lequel ils examinent la résolution des conflits liés à l’eau aux niveaux local et international. Ils explorent « les liaisons inexorables entre les trois facettes de la gestion des conflits et de la transformation : la résolution de discussion alternative (ADR), la participation publique et la capacité institutionnelle. »


"L'eau nous force à repenser les notions de sécurité, de dépendance et d’interdépendance. L'interdépendance induite par le partage de l'eau et les différents réseaux d'infrastructure est souvent vue comme une vulnérabilité. Cependant, il y a une manière alternative de considérer l'interdépendance. Elle peut être vue comme l’opportunité de construire des liens qui augmenteront notre flexibilité et notre capacité de répondre aux exigences de la nature, réduisant ainsi de fait notre vulnérabilité aux événements tels que les sécheresses et les inondations. Un tel renversement de perspective a été central dans le processus d’évolution de la civilisation." (Managing and transforming water conflicts, p 29)

Ce livre, malheureusement seulement disponible en anglais, est une bible pour tous les acteurs de l’eau : chercheurs, ingénieurs, économistes, géographes, géologues et politiques se passioneront pour cette analyse détaillée sur les moyens de développer des stratégies de prévision et de médiation entre les utilisateurs concurrents de ressources en eau. Une large gamme d'études de cas, montrant comment certains des conflits liés à l’eau les plus difficiles à résoudre ont été abordés, est incluse.


Managing and transforming water conflicts, Cambridge University Press, décembre 2008 (import)


Infrastructures : la Banque mondiale promet 50% de financements en plus

Dans le cadre du nouveau Programme d’appui aux infrastructures existantes et nouvelles (INFRA), la Banque mondiale accordera 45 milliards de dollars de prêts à l’infrastructure dans le secteur de l’eau au cours des trois prochaines années, soit 15 milliards de plus que pendant les trois années précédant la crise. C’est ce qu’a annoncé le président du groupe de la Banque mondiale, Robert B. Zoellick, le 23 avril.

La nature des investissements dépendra des demandes faites par les pays bénéficiaires. Les prêts pourront concerner la gestion de la ressource, la distribution, l’assainissement. Des projets bien ficelés de dessalement d’eau de mer pourraient aussi être éligibles. D’autre part, la petite hydro-électricité pourrait être particulièrement encouragée, dans le cadre du « programme vert » de l’INFRA, qui vise à développer les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique.

Les crises qui ont secoué l’Amérique latine dans les années 1980 et l’Asie dans les années 1990 ont montré « l’impact négatif qu’un recul de l’activité dans le secteur des infrastructures peut avoir dans un pays, en ébranlant les fondations d’une croissance économique à long terme d’une manière particulièrement préjudiciable aux groupes de populations les plus pauvres. L’infrastructure fournit également un appui essentiel à l’agriculture. En l’absence de l’infrastructure nécessaire, une grande partie de la production agricole peut être perdue ». a expliqué Robert Zoellick. Dans le même esprit, en raison de la crise alimentaire qui a sévi l’année dernière le groupe accroît également son appui à l’agriculture. Cette enveloppe passera de 4 milliards de dollars en 2008 à 12 milliards de dollars au cours des deux prochaines années. La filiale du groupe chargée de financer le secteur public, l’International Finance Corporation, a de son côté créé un mécanisme d’appui à l’infrastructure en situation de crise (Infrastructure Crisis Facility - ICF) destiné à combler les besoins de financement des projets menés par le secteur privé. En effet, les fonds levés sur le marché des capitaux au titre d’investissements dans l’infrastructure de pays en développement sont tombés de 200 milliards de dollars en 2007 à 135 milliards de dollars en 2008 et devraient encore diminuer cette année.

vendredi 15 mai 2009

L’expo "Les toilettes, une question de dignité" débarque à Paris

Pour briser le tabou du manque d’accès aux toilettes partout dans le monde, les ONG Eau Vive, Hydraulique Sans Frontières, Ingénieurs sans Frontières, WWF-France, membres de la Coalition Eau, ont décidé en partenariat avec la Ville de Paris, de présenter en plein coeur de la Capitale l’exposition « Les toilettes, une question de dignité », du 14 au 16 mai, place René Cassin (1er).

L’exposition, déjà accueillie à New York, Berlin, Singapour et Nairobi, met en scène des silhouettes à taille humaine, illustrant concrètement l’absence de toilettes. Elle s’adresse aux citoyens et aux collectivités, pour les alerter et les mobiliser sur un enjeu majeur et pourtant méconnu.

Alors que s’est tenue en 2008 l’année internationale de l’assainissement déclarée par l’ONU, les organisateurs veulent rappeler que la réalité du manque d’accès aux toilettes touche quotidiennement plus de 2 milliards d’êtres humains, engendrant des impacts sanitaires, économiques et environnementaux lourds.

mercredi 13 mai 2009

14 mai : Présentation à Paris du «rapport de suivi mondial 2009» de la Banque Mondiale

Demain la Banque Mondiale présentera à 14h30 son rapport de suivi dans ses locaux parisien.

Le Rapport de suivi mondial 2009 : Une crise du développement alerte l’opinion contre les nombreux risques que fait peser la crise. La croissance des pays en développement pourrait chuter à 1.6% en 2009, comparée à une moyenne de 8.1% en 2006-2007, ce qui signifie un accroissement de la pauvreté majoritairement en Afrique sub-saharienne, brisant l’élan amorcé dans cette région au cours des dernières années. De 55 à 90 millions personnes additionnelles risquent de tomber sous le seuil de la pauvreté extrême et le nombre de personnes souffrant de faim chronique risque d'atteindre le milliard cette année.

Le Rapport préconise d’accorder une attention particulière aux programmes et aux services de protection sociale ciblant les plus pauvres et les groupes vulnérables contre les effets immédiats de la crise, d’accélérer la réalisation des objectifs de développement humain, notamment dans le domaine de la santé où les perspectives sont les plus sombres, mais aussi la mobilisation du secteur privé pour atteindre les objectifs de développement dans un contexte de crise.

L’auteur sera heureux de répondre aux questions lors d’une session à la Banque mondiale présidée par Mr. Jean Louis Vileajus, Président de Coordination Sud.

Solidarités, pour l'accès à l'eau potable en Afghanistan

SOLIDARITES est une association d’aide humanitaire internationale qui secourt les populations victimes de conflits armés ou de catastrophes naturelles.


A Kaboul en Afghanistan, SOLIDARITES met en œuvre des programmes d'accès à l'eau potable, à l'assainissement et à l'hygiène, en partenariat avec le Service d'Aide Humanitaire de la Commission Européenne (DG ECHO). Ce partenariat, ainsi que les dons des particuliers, sont vitaux pour la poursuite de cette action humanitaire


Pour en savoir plus sur l'association SOLIDARITES


mardi 12 mai 2009

L’opération « 1 litre pour 10 litres » de Danone trouve le soutien de L'artiste japonaise Misia


L'artiste japonaise de renommée mondiale, Missako Ito, dite Misia, qui a bouclé dimanche une tournée d'une semaine dans la région de Mopti (dans le centre du Mali), a appelé les partenaires au développement à plus d'aide à l'Afrique en général et au Mali en particulier pour la réalisation de forages.


En séjour au Mali dans le cadre de la campagne "1 litre pour 10 litres" initiée par le Fonds des Nations unies pour l'enfance (UNICEF) et l'entreprise Danone Waters qui a déjà permis la réalisation de 18 forages, la réhabilitation d'une soixantaine d'autres en faveur des communautés défavorisées, la chanteuse japonaise a été émue aux larmes quand elle a vu les enfants du petit village de Tiara, un ancien site endémique du ver de Guinée. "C'est aujourd'hui que je me suis rendue compte de l'importance de l'eau. Elle est même plus importante que les médicaments. J'aime l'Afrique, mais aussi sa musique qui m'inspire beaucoup. C'est pour aider ce continent que j'ai créé la fondation Child Africa (Enfant d'Afrique)", a confié l'artiste à un groupe de journalistes maliens et japonais qui l'accompagnait. Elle a souhaité la pérennisation du projet "1 litre pour 10 litres" et invité d'autres organismes internationaux de le rejoindre.


L'opération "1 litre pour 10 litres", qui en est à sa troisième édition, est bâtie autour de l'idée que pour chaque litre d'eau Volvic (produit du groupe Danone), acheté par le consommateur japonais, les populations maliennes bénéficieront de 10 litres d'eau. Selon Ismael Maïga, chargé de Communication à l'UNICEF Mali, en trois ans de campagne, il a été récolté plus d'un million de dollars US. Il a aussi indiqué que cette opération a permis aussi à renforcer l'éducation à l'hygiène et à l'assainissement en milieu scolaire. Ainsi, a-t-il dit, le programme "L'école amie des enfants, amie des filles" a boosté la dotation de plusieurs écoles en points d'eau potable et en équipement d'hygiène et d'assainissement.

dimanche 10 mai 2009

Les guerres de l’eau

Jeffrey D. Sachs est professeur d'économie et dirige l'Institut de la Terre à l'université de Columbia. Il est aussi connu à travers sa coopération avec des agences internationales sur les thèmes de la réduction de la pauvreté, l’annulation de la dette, et le contrôle épidémiologique – notamment du SIDA, dans les pays en voie de développement. Il est le seul universitaire à avoir figuré plusieurs fois au classement des personnalités les plus influentes du monde publié par le magazine américain Time Magazine. Nous reproduisons ci-dessous sa tribune parue dans Les Echos, no. 20413, du lundi 27 avril 2009.


« La pénurie d'eau est responsable de nombreux conflits dans le monde ou de leur aggravation. Du Tchad au Darfour (Soudan), du désert de l'Ogaden (Ethiopie) à la Somalie, à travers le Yémen, l'Irak, le Pakistan et l'Afghanistan, s'étend un immense arc de terres arides où la rareté de l'eau provoque disettes, extrême pauvreté et désespoir.

Des groupes extrémistes comme les talibans peuvent facilement recruter dans de telles communautés. Et les gouvernements perdent leur légitimité lorsqu'ils sont incapables de garantir à leur population des besoins de base comme eau potable, récoltes, nourriture pour le bétail....

Les dirigeants politiques, les diplomates et les chefs des armées dans ces pays en conflit considèrent ces crises comme ils le feraient pour tout autre défi politique ou militaire. Ils lèvent des armées, organisent des factions politiques, combattent les chefs de guerre ou les fanatiques religieux.

Mais ces actions ne répondent pas au problème fondamental d'aider ces communautés dans leurs besoins urgents d'eau et de subsistance. Du coup, les Etats-Unis et l'Europe dépensent des dizaines, parfois des centaines de milliards de dollars pour envoyer des troupes et des bombardiers pour réprimer des rebellions ou pour lutter contre les « Etats faillis », mais ils n'envoient pas le dixième voire le centième de ces sommes pour lutter contre le manque d'eau et le sous-développement.

Les problèmes de l'eau ne se résoudront pas d'eux-mêmes. Bien au contraire ! Ils ne peuvent que s'aggraver, sauf si la communauté internationale réagit. Selon des études de l'Unesco et de la Banque mondiale notamment, de nombreux pays pauvres et instables sont confrontés à un fragile équilibre en matière de ressources en eau. Le manque croissant d'eau, surtout dans les zones arides, reflète l'explosion démographique, l'assèchement des nappes phréatiques, le gaspillage, la pollution et les effets dévastateurs du changement climatique. Des solutions pratiques existent. Elles passent par de très nombreuses actions, comme une meilleure gestion des ressources en eau, une amélioration des technologies pour accroître l'efficacité de leur utilisation, et de nouveaux investissements conjoints, publics, d'entreprises et d'ONG.

Dans les « villages du Millénaire » en Afrique, un projet des Nations unies, nous travaillons avec des communautés pauvres, les gouvernements, les entreprises pour développer des solutions afin de répondre à l'extrême pauvreté dans les zones rurales. Au Sénégal, par exemple, JM Eagle, un fabricant de tuyaux en PVC, a offert plus de 100 kilomètres de canalisations, pour permettre l'accès à l'eau potable de plusieurs dizaines de milliers de personnes.

Mais la pénurie d'eau menace de toucher de plus en plus de pays, riches ou pauvres. Les Etats-Unis, par exemple, ont encouragé une ruée sur les Etats arides du Sud-Ouest. Le coeur agricole de l'Australie, le basin Murray-Darling, connaît aussi de graves sécheresses. De même, le bassin méditerranéen est menacé par le changement climatique. D'une région à l'autre, l'origine précise de la crise varie. Le Pakistan, un pays déjà aride, souffrira sous la pression de la croissance rapide de sa population qui, de 42 millions en 1950, atteindra 184 millions en 2010 et 335 millions en 2050, si les prévisions « moyennes » de l'ONU se réalisent.

Il est nécessaire de trouver des solutions à tous les niveaux : à l'intérieur des communautés agricoles, comme au Sénégal, le long des cours des rivières et, internationalement, par la lutte contre les pires effets du réchauffement climatique. Des solutions durables passent par des partenariats entre gouvernements, entreprises et sociétés civiles. Ce qui ne sera pas facile à obtenir et à gérer car ces différentes entités ont souvent peu d'expérience, si ce n'est aucune, du travail en commun.

De plus, la plupart des gouvernements sont mal équipés pour faire face à ces difficultés alors qu'ils doivent aussi apprendre à travailler avec les communautés locales, le secteur privé, les organisations internationales et les donateurs. Les ministères chargés des questions de l'eau emploient, traditionnellement, des ingénieurs et des fonctionnaires non spécialisés. Alors qu'il est nécessaire de faire appel à des experts sur des questions allant du climat à l'écologie, en passant par l'agriculture, la population, l'économie, la vie et les cultures locales.

La prochaine étape cruciale est de réunir des scientifiques, des dirigeants politiques et du secteur privé de pays qui ont des problèmes identiques et de réfléchir ensemble à de nouvelles approches en la matière. Un tel brainstorming permettrait d'échanger des informations qui pourraient sauver des vies et des économies. Cela soulignerait aussi une simple vérité : le défi commun du développement durable doit réunir un monde divisé, par la richesse, la religion et la géographie. »

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